Groupe de travail Algérie
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Groupes Santé Afrique |
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MANAGEMENT DE LA SANTE EN AFRIQUE FRANCOPHONE |
Groupe de travail
- Christophe Cassan
- François Hubert
SWOT
Bilan et situation 2012
La situation sanitaire actuelle
- Le système de santé algérien doit s’adapter à deux transitions : la transition démographique et la transition épidémiologique.
- La transition démographique est complexe et se traduit par une croissance rapide de la population (taux nettement plus élevé que dans les pays occidentaux par exemple) couplée à un vieillissement sensible, avec une forte progression de la tranche des 60 ans et plus (projection à plus de 15 % de la population en 2020 d’après l’OMS). Dans le même temps, la tranche des moins de 15 ans, dont la croissance reste contenue, représente encore une part très significative de la population.
- D’un point de vue épidémiologique, le pays est confronté à la fois aux priorités sanitaires des pays en développement et à celles des pays développés
Des mortalités maternelle et infantile encore anormalement élevées (mortalité infantile à 31,3‰, ce qui classe l’Algérie parmi les 3 derniers du benchmark) Une persistance de certaines maladies transmissibles et une résurgence épisodique de certaines maladies infectieuses « oubliées » (hydriques, tuberculose, scarlatine, …) Une augmentation régulière et soutenue des pathologies chroniques, dites « modernes » (maladies neuropsychiatriques, pathologies digestives, cardio-vasculaires, diabète, asthme/allergies, …) Une augmentation alarmante des pathologies graves et très lourdes à prendre en charge (cancers, maladies de système, maladies métaboliques…) Une forte prévalence des accidents domestiques et de la route qui nécessitent de prendre en charge des traumatismes lourds et d’importants moyens chirurgicaux. A titre indicatif, les premières causes de décès actuels sont : les cancers et les traumatismes, les maladies cardiovasculaires, les affections périnatales. Cette transition épidémiologique complexe et relativement courte dans le temps se traduit par une dispersion inévitable des ressources matérielles et humaines pour faire face à des besoins très divers. Ce spectre très large de maladies, de situations socio-médicales et sociales à traiter contraint très significativement le système de santé en termes organisationnel et financier. Les transitions démographique et épidémiologique imposent donc au système de santé algérien de se transformer à nouveau pour assumer les nouvelles pathologies et les nouveaux patients, rendant indispensable une évolution structurelle de ce système de santé, en particulier sur son volet financement et sur son organisation.
Un Plan National Santé a été présenté en 2006, puis actualisé en 2008, afin de moderniser la santé et la rendre plus efficace . Cependant, ce plan n’a pas fait l’objet d’une évaluation factuelle et transparente des réalisations et des résultats obtenus à mi parcours. En 2006, 38 programmes de santé publique ont été lancés, dont le coût a été évalué à près de 200 milliards de DA financés à horizon 2009, avec une volonté d’ « évaluation à mi parcours » – non datée de ces programmes ; A 2012, cette évaluation n’a pas encore été réalisée, ou du moins ses résultats n’ont pas été rendus publics. Cette évaluation est un pré-requis essentiel tant pour la poursuite des réformes que pour valider les axes de refonte du système de santé.
Un accès inégal aux soins pour les citoyens, tributaires de leur positionnement géographique et de leurs moyens. Une implantation inégale des infrastructures hospitalières sur le territoire avec (sur)concentration en zone littorale et urbaine, à laquelle s’ajoute un retard relatif par rapport aux pays du benchmark en matière d’infrastructures de base et de ratio lits hospitaliers / habitant : Une couverture médicale disparate (ex : 1,52 médecins pour 1000 hab dans le Centre, contre 0,81 pour 1000 hab dans le Sud Est ; 1 spécialiste pour 733 hab à Alger, contre 1 spécialiste pour 12 827 pour Djelfa) [1] Des populations rurales qui sont encore à une distance géographique élevée des infrastructures hospitalières et se sentent dès lors délaissées. Une part du reste à charge des ménages qui, d'après les experts [2], dépasserait les 40% de la dépense en santé et creuse de fait les inégalités d’accès. On constate également une structure de la Dépense Nationale de Santé (DNS) déséquilibrée avec une part des ménages de près de 30%, celle de l’Etat à 40% et les 30% restants à la charge de la Sécurité Sociale. D'après les experts, une prépondérance des spécialistes au détriment des généralistes, avec un recours quasi systématique au spécialiste en première intention de consultation. Des ruptures récurrentes et de longue durée dans l’approvisionnement en médicaments et en produits de santé.
Une efficacité du système de santé qui demeure faible au vu de l’état sanitaire des Algériens par rapport à des pays à revenu comparable, malgré les moyens relativement importants qui ont été mobilisés notamment depuis une décennie. Une volonté de poursuivre le développement des équipements lourds et la création de nouvelles structures hospitalières, ce qui privilégie une logique de volume au détriment d’une réflexion prospective et qualitative sur les besoins de prise en charge à moyen terme / long terme. Un écart fort entre les statistiques, qui produisent des indicateurs globaux satisfaisants et la réelle qualité de l’accès aux soins La qualité de services (infrastructures, équipements opérationnels, hôtellerie à niveau) et de prise en charge médicale et soignante est jugée très perfectible par les usagers (les malades, leurs familles et leurs accompagnants). En matière de qualité des soins, le fossé se creuse par ailleurs entre un secteur public voué à assister massivement les populations et un secteur privé plus ciblé et plus marchand ;
Une part du PIB actuellement consacrée à la santé qui reste relativement faible en Algérie (près de 6% en 2010), comparée aux pays du benchmark et aux standards internationaux (entre 7 et 10%) malgré les progrès récents accomplis. Un système de santé où la complémentarité entre les secteurs public et privé n’est pas organisée.
Des industries de la santé et du médicament sans stratégie ni régulation suffisante, avec notamment une industrie du médicament encore majoritairement importatrice Au-delà d’une volonté d’atteindre une production générique de masse, il n’y a pas de stratégie de développement à long terme du secteur qui soit partagée par les acteurs publics et privés. Un grand nombre d’acteurs privés à chaque maillon de la chaine de distribution face à une concentration croissante des acteurs publics (PCH): 300 laboratoires, 56 unités de productions locales, 65 importateurs, 150 grossistes répartiteurs, 8500 pharmacies, mais une PCH très centralisée. D’où une dispersion dans le circuit privé des approvisionnements avec éclatement des moyens et peu d’économie d’échelle, un centralisme excessif dans le circuit public avec des dérives et des défauts de gestion. Un cadre règlementaire, juridique et financier qui présente de nombreuses lacunes : Incomplet pour les bio-médicaments, les dispositifs médicaux, les produits OTC et de parapharmacie, Obsolète pour les mises aux normes et bonnes pratiques face à l’évolution importante dans le monde des PBF (Bonnes Pratiques de Fabrication), des BPC (Bonnes Pratiques de Contrôle), nécessité de créer des BPD (Bonnes Pratiques de distribution), Insuffisant pour encore mieux encadrer les pratiques des nouveaux secteurs : cliniques, centres de radiologie/imagerie et d’analyses biomédicales (par exemple les Bonnes pratiques biomédicales en établissement de santé, les BPM (Bonnes Pratiques Médicales), et les BPL (Bonnes Pratiques de Laboratoire). Des dysfonctionnements majeurs et récurrents dans les circuits d’approvisionnement de produits et dans la maintenance des appareillages destinés aux malades, mettant en évidence des carences de communication entre les acteurs, mais aussi en terme de gestion, de régulation et de contrôle. Une carence en ressources humaines qualifiées et spécialisées (acheteurs, planificateurs industriels, qualiticiens, chefs de projets, gestionnaires et financiers, techniciens et ingénieurs, chercheurs, laborantins, pharmaciens industriels, contrôleurs et assurance qualité, …).
[1] Source : sources : MSPRH et OMS, [2] Sources : experts rencontrés, Pr J.P. Grangaud, IPEMED
François HUBERT - CODATA France